VERBATIM. Juger et pardonner (méthode 3)

Par Florent Blanc et Richard Pétris. L’arrestation récente de l’un des derniers fugitifs serbes, le général Mladic, surnommé « le boucher des Balkans » , est venue confirmer l’avancée qu’avait représentée pour la justice pénale internationale l’inculpation, en plein conflit – à la différence du procès de Nuremberg – des principaux responsables bosno-serbes de la guerre et des crimes contre l’humanité commis en Bosnie. La culture de la paix y gagne, et celle-ci passe par des efforts pour se libérer des mythes et pour renforcer l’esprit critique.

C’est le rôle doublement essentiel qu’a joué ce tribunal de La Haye. En pointant les crimes commis par tous les belligérants, il donne à lire un récit dans lequel les inculpés n’apparaissent plus comme d’invulnérables héros mais comme des criminels en fuite. Il en va de même pour la Cour pénale internationale, compétente pour juger les présumés auteurs de crimes de guerre, génocides et crimes contre l’humanité.

En Amérique latine, en Afrique, en Asie comme en Europe, c’est l’arrestation récente de l’un des derniers criminels de guerre avec l’ère nouvelle ouverte par la chute du mur de Berlin et la fin de la guerre froide que se sont également multipliés, lors des sorties de conflits et pour y contribuer, les appels à la vérité comme le passage obligé pour parvenir à un règlement, voire pour réparer le traumatisme produit par les exactions.

Comme le montre, dans le chapitre ci-après, l’analyse de la « méthode » de la Commission vérité et réconciliation en Afrique du Sud, ces procédures supposent un mélange de courage et d’intelligence politique. Si les entretiens, portraits et témoignages de la Canadienne Louise Arbour, ancienne haute-commissaire de l’ONU aux Droits de l’homme, de Rithy Panh, réalisateur cambodgien et fondateur d’un centre de documentation au service de la mémoire de son peuple et du docteur palestinien Izzeldin Abuelaish, lequel a perdu trois de ses filles dans une attaque de l’armée israélienne à Gaza en 2009, qui complètent ce chapitre, attestent la forte dimension humaine de cette phase de la réconciliation, c’est aussi parce qu’ils confirment qu’à la question d’un juge : « Qu’attend-on de la justice ? », la réponse doit bien être : « Un avenir ! »

Ce texte a été rédigé au printemps 2011 par Richard Pétris et Florent Blanc pour l’ouvrage « Oser la paix » publié en collaboration avec les éditions Autrement, dans la collection Mook.